vendredi 8 février 2013

La maman koala

Je ne me suis jamais vraiment imaginée dans la peau d'une maman.

Quand je me suis installée avec mon homme, il était hors de question d'avoir des enfants. Le monde était trop dur (chômage, réchauffement climatique) et je ne voulais pas avoir toute la responsabilité des séances d'analyse de ma descendance (c'est toujours de la faute de la maman). 
Quand je suis tombée enceinte, je savais que le métier de mère au foyer n'était pas pour moi et que je ne prendrai jamais de congé parental. J'ai besoin de voir du monde et de penser à autre chose. M'occuper de mes enfants le soir et le week-end me suffit amplement.
Quand Lulu est née, je l'ai habituée à ne pas être dans mes bras en permanence. Je courais dans sa chambre pour la réconforter dès qu'elle avait un problème mais le reste du temps, elle était dans son parc et je vaquais à mes occupations en lui disant où j'allais et ce que je faisais. Elle a eu sa chambre dès le retour de la maternité et je n'ai jamais pratiqué le cododo. J'ai tout mis en oeuvre pour qu'elle sache se détacher de moi. 

Ma fille en a décidé autrement. 
A 2 mois et demi, nous sommes allés à une cousinade, une fête familiale regroupant tous les cousins et cousines de mon mari, et dès notre arrivée, tout le monde s'est extasié devant la petite puce. C'est à ce moment-là qu'elle s'est mise à hurler. Non stop. Il a fallu la mettre à l'écart pour qu'elle se calme et personne n'a pu l'approcher de toute la soirée.
A partir de ce jour, toute nouvelle tête était source d'angoisse. A part nous et la nounou, personne ne pouvait l'approcher sans avoir droit, au mieux à une moue inquiète, au pire aux larmes. Mêmes les grands-parents, qui ont eu beaucoup de mal à l'accepter. On nous l'a bien sûr reproché à demi-mot ("Vous la couvez trop") alors qu'on n'y était pour rien. Elle allait chez la nounou 4 jours par semaine, voyait ses grands-parents tous les 15 jours. La seule chose que je refusais, c'était de la laisser pour une nuit. 
Je me souviens quand nous avons déménagé en Normandie, je suis allée rendre visite à un médecin dans le but de choisir notre nouveau médecin traitant. Il m'a demandé de déshabiller Lulu et a commencé à l'ausculter. Comme à son habitude, elle s'est mise à pleurer et à s'agripper très fort à moi. Le médecin a émis un grognement et m'a posé la question fatale: "Vous êtes à la maison ?" Je lui ai expliqué que j'étais effectivement au chômage depuis le déménagement et que je gardais Lulu. Il m'a alors répondu qu'il fallait que nous laissions Lulu à ses grands-parents tout un week-end pour nous retrouver en amoureux. Euh... pardon ? On se connaît depuis 5 minutes et il se permet de juger ma vie ? Non, monsieur le médecin, je n'ai pas de problème de fusion avec ma fille, non, monsieur le médecin, je n'ai aucun problème de couple qui nécessite d'expatrier ma fille loin de nous. Il va sans dire que je ne l'ai pas revu.
Au fil des années, Lulu a transformé cette "angoisse" de l'étranger en timidité. Chaque fois qu'elle rencontre quelqu'un, elle se cache derrière nos jambes et met ses doigts dans sa bouche (plus elle est intimidée, plus il y a de doigts). A côté de ça, c'est une petite fille pleine d'entrain qui joue beaucoup avec ses petits copains de la crèche et n'importe quelle personne qu'elle connaît depuis plus de 20 minutes. Ainsi, lorsque ses grands-parents nous rendent visite, elle court pour s'agripper à moi et au bout de 15-20 minutes, elle rit aux éclats et fait des bisous à Mamie. Il lui faut juste un peu de temps pour s'acclimater. 

J'ai toujours pensé que c'était dans son caractère et que mon seul défaut était d'être une maman câlin. Jusqu'au jour où elle a eu une gastro. Nous regardions tranquillement la télévision lorsque Lulu s'est mise à hurler dans sa chambre: soirée vomito en vue !! Après plusieurs passages dans la baignoire et changements de draps, je suis restée dans la chambre avec elle, à la fois pour la surveiller et pour la réconforter. Le sol étant assez inconfortable, je me suis allongée dans le lit avec elle et elle s'est nichée dans mes bras. A ce moment-là, je me suis sentie complète: ce bébé qui était sorti de moi 2 ans auparavant avait repris sa place dans mon ventre. J'étais apaisée, sereine, heureuse. Je me suis sentie tellement bien que j'ai compris que si elle était autant attachée à moi, c'était peut-être bien de ma faute, après tout. J'aime ce contact avec ma fille, j'aime la sentir près de moi, même si je suis très contente de la laisser à la crèche pour me reposer une journée.

Teemo, lui, n'a pas (encore ?) contracté cette angoisse de l'étranger. Au contraire, il gratifie tout le monde de ses plus beaux sourires et de ses babillages. Mais aujourd'hui, alors qu'il était dans son transat à me regarder faire ma peinture, il a émis des gémissements et a tendu les bras vers moi en m'implorant des yeux: "Maman ! Câlin !"

En fait, je crois que je suis une maman koala.


3 commentaires:

  1. ta fille est le parfait reflet de ma fille et de sa crainte des inconnus autres que papa maman et nounou. Heureusement en grandissant ça va mieux. Tant qu'on est réceptif aux besoins koalas de nos enfants, l'évolution ne peut être que positive!

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  2. C'était peut être de la faute de ta propre peur , ta crainte d'être trop protectrice , trop maman poule qui te distanciait d'elle mais que tu n'assumais sans doute pas pleinement , les enfants sentent ce genre de choses et sans doute l'angoisse se transmettait involontairement à ta fille .
    Le premier enfant est l'enfant test , celui qui porte nos angoisses , le second en général est bien mieux dans ses baskets !
    Pourquoi vouloir à ce point se distancier d'un bébé , il est temps de le faire au fur à mesure qu'ils grandissent ... As tu eu une maman trop protectrice ? voire étouffante ? Moi c'est tout le contraire , j'ai jugé que ma mère avait "failli" bien souvent dans son rôle de mère , c'était une maman qui travaillait , elle n'avait jamais un moment pour nous , je rentrais seule de l'école dès le plus jeune age , devait ne compter que sur moi pour tout , alors c'est certain que ça fait de moi quelqu'un super autonome et débrouillard mais le manque à toujours été là et j'ai pris le contre pied exact de ma mère en étant une maman à la maison , une maman poule et gâteau et gâteuse ^^ mais mes enfants vont bien ils sont comme on dit "épanouis" , ils n'ont peur de rien ( ce qui moi m'éffraie ) , là mon fils revient d'une semaine de ski avec sa classe il a dix sept ans et pendant une semaine je l'ai imaginé se fracasser tous les membres , un vrai cauchemar , mais lui , il va super bien !
    Courage Cléophis , toutes les questions que tu te poses font et feront de toi une super maman !

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    1. Coucou Domi, ça fait plaisir de te revoir par ici :)
      C'est drôle ce que tu me racontes parce c'est un peu des deux. Ma mère adore les enfants en bas âge donc j'ai été très couvée mais elle nous lâche en grandissant et du coup, j'ai appris à me débrouiller toute seule dès mon adolescence, j'ai même très souvent joué le rôle de maman auprès de ma soeur,qui a 10 ans de moins que moi, quand elle travaillait.
      Je me rends compte avec le temps que j'adore passer du temps avec mes enfants, même si quelquefois ils me portent sur les nerfs. J'avais hâte de reprendre le travail à la naissance de Lulu et aujourd'hui, je me vois mal laisser Teemo à une inconnue. Finalement, on se découvre soi-même avec le temps :)

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